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Chloé Coomans  

« L’œuvre de Chloé Coomans ressemble à un pari : celui de donner un visage à notre expérience intérieure.  Sans doute parce qu’elle a l’intuition que notre corps fonctionne comme la mémoire archaïque de notre existence, son œuvre, protéiforme, est avant tout langage de l’intimité.

Son corps est un champ de bataille.  Elle saigne, se vide de l’intérieur pour témoigner d’une connaissance par les gouffres.  Comme si ses états d’âme étaient en quête de représentations, elle se met, dans tous les sens du terme, en jeu et propose une scénographie de ses tourments, un encéphalogramme de son âme.

Elle recourt à des symboles.  A contre-courant de notre époque consumériste et spectaculaire qui vide nombre de signes de leur sens, de leur impact politique ou même de leur capacité d’évocation en les utilisant à grande échelle, elle en invente de nouveaux, et parce qu’elle est avant tout plasticienne, elle parie sur leur force esthétique, leur intérêt graphique.

Ainsi les Nœuds, métaphore de ce magma, de ce bouillonnement intérieur constitutif de la personnalité de chacun ; les nœuds qu’elle sérigraphie, qu’elle entasse dans des installations, dont elle cherche la trace, et qui deviennent, tripes géantes, le véritable corps de sculptures monumentales.  Des nœuds qui prennent le risque de l’envol, entre deux volatubilis, qui se condensent en nuages noirs, parce qu’il faut bien s’en libérer.

De même les cœurs d’artichaut qu’on effeuille, avec les poils desquels on se débat…  avant de profiter du goût véritable de la tendresse.  Peut-être parce que le soleil de l’amour est au cœur d’émotions contradictoires qui nous promettent la plus grande sensibilité existentielle mais aussi la plus grande perdition, Chloé se livre à cœur ouvert, sans anesthésie.

Dans sa récente installation vidéo (Under Control, primée à Ostrale 012), de quoi s’agit-il si ce n’est de mettre ses émotions en boîte, au risque de les multiplier à l’infini par un jeu de miroirs ?  Les mettre en boîte, sans doute pour consigner leur frénésie, apprendre à mieux les maîtriser, voire espérer leur transmutation… parce que toute peur cache un désir !

A l’heure où les messages du mensonge publicitaire, une prétendue postmodernité, et la mécanique de la pornographie ont presque anéanti toute possibilité de figuration, Chloé nous fait ressentir l’urgence de ré-érotiser les corps, quitte à commencer par « là où ça fait mal ».

Pas question ici de narcissisme.  Ce qui est singulier est universel.  Personne n’a besoin d’une notice pour comprendre qu’un nœud est viscéral… et une telle démarche introspective ne sonne juste qu’au prix d’une intransigeance qui ne permet aucune complaisance.

Nos débats intérieurs, s’ils ne sont pas le nombril du monde, n’en restent pas moins le prisme par lequel nous l’appréhendons.  Ceux qui refuseront cet art incarné, ce spectacle trop humain, se priveront de sa lueur radicale : la beauté surréelle d’une certaine forme de catharsis »

xa – janvier 2013

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